13 juillet 2012

Traduction libre | Victor Meldrew, or I don't like to complain, but... VF

Monsieur Malcommode ou « Je n’aime pas me plaindre, mais… »  

Je suis en train de réfléchir à l’action de se plaindre et à la façon dont on perçoit le « chialage » dans différents pays.  

En Angleterre, les gens ont tendance à manifester une insatisfaction en disant : « Je sais que je ne devrais pas rouspéter, mais… » ou recherchent l’approbation d’autrui en annonçant : « Est-ce que c’est juste moi ou est-ce que… », espérant en fait que la réponse soit : « Non, ce n’est pas seulement toi, c’est effectivement… » Approuvée objectivement, la plainte est alors légitimée. 

Mon intérêt pour le chialage interculturel a d’abord été piqué lorsque je suis venu en Allemagne et que j’ai remarqué à quel point les Allemands se plaignaient constamment. (Bien qu’ils ont, certes, l’un des meilleurs niveaux de vie en Europe.) Ça y est aussi naturel qu’un bébé qui pleure dans son landau. Il n’existe pas de filtre ni de gêne ni de stigmate sociaux. 

En contexte européen, l’Angleterre et l’Allemagne se positionnent en fait aux extrémités opposées du spectre. En Angleterre, se plaindre est perçu comme un signe de faiblesse, une incapacité à gérer une situation. Il y a divers qualificatifs pour décrire un quelqu’un qui se plaint (un « chialeux », un grincheux, un Monsieur Malcommode...) De nos jours, même de légitimes plaintes en Grande-Bretagne sont fréquemment rabrouées, étiquetées comme étant antipatriotiques ou un affront au mode de vie anglais.

Les choses ne pourraient pas être plus différentes en Allemagne, où se plaindre signifie dévoiler son humanité. Hé! Personne n’est parfait et la vie est dure, donc partageons nos insatisfactions. (L’opposé, inacceptable, serait le pendant américain : « La vie est belle », attitude qui y serait considérée comme présomptueuse).  

Il existe cependant une autre forme de plainte, en France. Là-bas, protester démontre qu’on n’est pas bonasse et indique également que l’on appartient à mieux. Ceux qui ne se plaignent pas se satisfassent alors forcément de peu et n’ont aucune ambition. Or, qui se plairait à être ainsi défini? Protester s’avère donc un indice du statut social.

Ma mère, par exemple, s’est plainte toute sa vie. Elle ne fait pratiquement rien d’autre, à tel point que si elle cessait de chialer j’en serais très concerné. Et moi? Comme d’habitude, je suis coincé au milieu. Bien que mon mantra de prédilection soit « Quand la vie tourne au vinaigre, ça permet de relever ses manches », le chialage ne m’est pas inconnu. Récemment, j’ai dû passer un an en Écosse et je ne pouvais pas me retenir de chialer. C’en était trop, et j’en détestais chaque minute.

Peut-être que se plaindre dénote véritablement une incapacité à affronter l’adversité, à laquelle la société devrait rétorquer : « Eh bien, il faut t’y faire! » Du moins, c’est ce que je dis au moment où j’ai peu de raisons de me plaindre…  

Source: Margit Appleton, blogue Intercultural Musings